Les tubes pneumatiques de la BnF Richelieu

La réhabilitation et la réouverture de la BnF Richelieu permet de profiter de ces lieux patrimoniaux exceptionnels empreints d’une histoire pluri-séculaire.

A commencer par la salle Labrouste ornée de ses 9 coupoles décorées de mosaïques, soutenues par de fines colonnettes de fonte d’une dizaine de mètres… et meublée d’époque !

Au fond se trouve le Magasin central.

Ce lieu de stockage des livres et documents, autrefois inaccessible au commun des mortels, devient aujourd’hui une salle publique, dans le prolongement de la salle Labrouste. Inauguré en 1868, cet espace n’a cessé d’être densifié par la création de nouveaux niveaux, notamment les magasins Roux-Spitz des années 1930-1950. La structure fonte et acier a été renforcée par un coulage de béton dans certains interstices, tandis que les planchers ont été remplacés par des caillebotis en aluminium. « Les filets et les rehausses de garde-corps adoptent un vocabulaire quasi-industriel« , détaille Bruno Gaudin, l’architecte.

Sans doute le plus remarquable, est cette structure de tubes trônant à l’entrée de la salle.

Il s’agit d’une machine permettant le transport par tube pneumatique. C’est un système propulsant par différence de pression des navettes cylindriques, lesquelles servaient à transporter les demandes d’ouvrages au magasinier. Chaque tube sur le côté, correspondait à un département (beaux-arts, histoire…), si l’ouvrage n’était pas disponible ou n’existait pas, la réponse revenait par le tube se trouvant au milieu.

Si l’ouvrage était disponible, il partait sur un chariot jusqu’au demandeur.

Ce système est une déclinaison de celui qui permettait le transport de correspondances par tube pneumatique, dû au chimiste Ador qui étudie le transport de lettres par air comprimé en 1836. Même s’il semble que la paternité du système soit attribuée à l’ingénieur écossais William Murdoch dans les années 1800, Ador fait une démonstration publique de son système en 1852 dans le quartier de Monceau.

Les « curseurs » autrefois en fer-blanc, sont aujourd’hui en plastique (appelés aussi navettes ou cartouches). Ils se déplacent à la vitesse de 400 m/min (soit 24 km/h, environ 6,5 m/s) dans les tubes sous l’action de hautes ou basses pressions produites dans des usines appelées ateliers de force motrice. Des conduites en fonte distribuent la pression et le vide. Les débits sont importants et les pompes, à piston, de grandes dimensions. À l’origine actionnées par de superbes machines à vapeur (celle de l’Hôtel des Postes ne s’éteindra qu’en 1947), elles seront remplacées progressivement à partir de 1927 par des groupes électro-pneumatiques d’une puissance totale de 1400cv.

Les curseurs sont expédiés des bureaux centres de forces par la pression et y sont ramenés par le vide. Les lignes sont composées d’une double conduite la plupart du temps en acier, une pour chaque sens (centrifuge et centripète).

Les appareils d’expédition et de réception sont de trois types : les antiques Fortin-Hermann de 1885 qui dureront jusqu’à la liquidation du réseau un siècle plus tard, les superbes appareils SFTP de 1927 et les appareils Lamson entièrement automatiques conçus par l’ingénieur Louis Gaillard qui se répandront à partir de 1946. Monsieur Gaillard avait inventé un système où le curseur, paramétré par le tubiste, sélectionnait lui-même le bureau où il devait parvenir pour y être éjecté.

En 1879, le maréchal de Mac-Mahon président de la République, signe un décret ouvrant au public le réseau des tubes pneumatiques. C’est l’acte de naissance de la poste pneumatique en France. On rédige les messages sur des petites cartes au format des cartes postales que l’on dépose dans des boîtes aux lettres spécifiques des bureaux de postes reliés au service. Les cartes sont aussitôt expédiées par tube vers le bureau desservant le destinataire. À l’arrivée dans ce bureau, un jeune télégraphiste à vélo partait immédiatement le porter à l’adresse indiquée, ce qui permettait aux usagers de transmettre un message à son destinataire en moins de 30 minutes à condition qu’il habitât dans Paris.

En 1934 le réseau pneumatique parisien atteint son apogée avec une longueur de 467 km, il dessert plus de 130 bureaux et distribue une dizaine de millions de correspondances par an (chiffre record de 30 millions en 1945).

Cette magnifique forêt de tubes est donc un beau vestige de notre patrimoine et génie industriel…

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